La soupe de Sidonie
Comédie burlesque inspirée de la pièce malienne « Bougouniéré invite à dîner »

Adaptation de Jean-Louis Sagot-Duvauroux

Avec Boniface Olsène Watanga, Léonie Assana, Benjamin Wagba, Silius Travolta Amoda, Louis Marie Naïssona.

Sidonie dirige à Bangui une ONG « humanitaire ». Citadine moderne et engagée, mais d’extraction populaire, elle a l’esprit fort occupé par un sport bien connu : la chasse aux subventions. Ce soir, un bailleur venu des pays riches a souhaité faire connaissance avec « l’Afrique profonde ». Il est attendu à dîner par la militante, installée dans sa cour. Sidonie commence à préparer le repas. L’eau boue dans la marmite.

Boubakar, un concepteur de monuments aigri

Boubakar, son époux, est un ingénieur au chômage, spécialisé dans la conception et la réalisation de «monuments historiques et machines spéciales». Débouchés rares, métier ingrat, mais passion exclusive, donc aigreur assurée. Pour Sidonie, c’est un paresseux, un phraseur. Elle ne se prive pas de le lui dire. Boubakar espère beaucoup sur la venue du bailleur pour plaider en faveur de l’œuvre de sa vie : un restaurant panoramique en forme de lion géant (symbole patriotique de la Centrafrique) sur la colline qui domine la capitale centrafricaine et où se déploie le nom de Bangui. Sidonie voit d’un très mauvais œil cette intention perturbatrice, susceptible de détourner à son profit l’attention du bailleur.

Des triplés très différents

De Boubakar, la moderne Sidonie, adepte du planning familial, n’a voulu avoir qu’une seule grossesse. Résultat : des triplés ! Dieudonné, surnommé « Ben Laden », est adepte d’une secte islamique, qui refuse le contact avec tout ce qui touche d’une manière ou d’une autre au monde occidental. Dieumerci est un « ultralibéraliste » touché par la grâce des évangélistes born again. Sidonie considère l’un et l’autre comme des bons à rien. Elle compte surtout sur Gloiradieu, émigré en France. Elle a néanmoins fait appel à tous les trois pour qu’ils l’aident à préparer un repas susceptible de séduire le bailleur.

Le « bailleur » viendra-t-il ?

À son grand désespoir, « Ben Laden », qui ne manque pas de lui faire une petite leçon d’Islam rigoriste, lui rapporte du gboudou sauvage, sorte d’épinard forestier aux vertus diététiques éprouvées, dont elle doute très fort qu’ils puissent être appréciée par le bailleur. Après avoir réuni ses maigres sous de capitaliste en mal de fonds de départ, Dieu merci n’a pu acheter que du poisson fumé. Quant à l’argent qu’elle attendait de Goiradieu, il ne viendra pas, et pour cause. Le jeune homme arrive piteusement dans la cour de sa mère, expulsé de France.

Bon appétit !

En dépit de ces mésaventures, Sidonie fait la cuisine sur scène, en direct, avec ce dont elle dispose, désolée de n’avoir à offrir à son hôte qu’un plat aussi rustique. Mais finalement, le bailleur se décommande. Il ne reste plus qu’à partager le plat et la sauce avec le public. L’échange vrai a remplacé la perfusion initialement espérée. Et c’est délicieux, diététique, roboratif, patriotique !

Un argumentaIre théâtral en faveur de l’autosuffisance alimentaire

Le rire, mais aussi la réflexion et l’émotion font vivre le décentrement fréquent de gens qui comptent avant tout sur l’extérieur pour résoudre les problèmes du pays. Les péripéties de l’histoire en décident autrement, permettant au passage d’évoquer de façon burlesque les différends religieux vécus au sein d’une même famille, métaphore d’un pays appelé à vivre uni tout en pratiquant des cultes différents.

Cette fable introduit une réflexion aux multiples facettes qui touche aux qualités nutritionnelles des aliments, aux traditions culinaires, à la solidarité sociale, à l’autonomie…

Un nouveau pas dans le partenariat artistique Mali-Centrafrique

« La soupe de Sidonie » est directement inspirée de la pièce « Bougouniéré invite à dîner », écrite par Jean-Louis Sagot-Duvauroux et Alioune Ifra Ndiaye pour la compagnie malienne BlonBa et qui en a été un des grands succès internationaux. Elle est la troisième étape d’un riche partenariat artistique maliano-centrafricain inauguré à Paris à l’occasion de l’initiative « Les Afriques à Paris » conduite par François Grosjean, alors directeur du théâtre du Grand-Parquet, avant de venir à Bangui présider aux destinées de l’Alliance française. Après ce mois de représentations parisienne (mars-avril 2015) où BlonBa côtoyait chaque jour les artistes du centre Linga Téré, la troupe malienne fait le voyage de Bangui pour une résidence de trois semaines (avril 2015) où près de 2000 personnes viennent applaudir son spectacle « Dieu ne dort pas » à l’Alliance française, à Kolongo plage, au Rex (Km 5), à Fatima et à Saint-Paul. Cette fois, ce sont les artistes Centrafricains qui s’emparent d’une pièce malienne, l’adaptent et la font leur. Un bel exemple de solidarité culturelle africaine. Une voie pour la création d’un imaginaire commun qui ouvre sur le dialogue et jette la violence aux orties.

juin 11 @ 09:05
09:05

Alliance française de Bangui

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